L'aube fleurie

Au chapitre des doux : ils rejaillissent sous forme de ravissantes étincelles dorées, au son d’une musique angélique, à l’ouverture de leur écrin printanier. Ces paillettes d'or illuminent nos regards et font battre nos cœurs. Elles nous parfument de tendresse. Nous caressent l'âme. 

Au chapitre des amers : ils sont bien moins sympathiques. Ils se font abeilles furieuses dont le voleur vient de saccager l’essaim pour y récolter le miel. Juste pour le plaisir. Juste pour la joie malsaine d’entasser des victoires inutiles dont il fait son trésor. Ceux-là ont une odeur rance qui nous asphyxie l’âme et appellent à nous les pensées sombres, qu'ils font sortir violemment comme une rivière débordant de son lit.

Et puis, au chapitres des doux-amers, il y a ceux qui nous laissent rêveurs. Ceux qui nous font « Jean qui rit-Jean qui pleure ». Ceux-ci semblent tout droit sortis d’un jardin de délices arrosé d’eau amère. Ils sont roses fanant à l'eden oublié de nos cœurs fatigués.  Leurs parfums exhalent des notes contradictoires. Les âcres notes de tête, tout d’abord, celles qui nous font grimacer. Qui pourraient presque nous donner la nausée. On s’en détourne avec dégoût, on refuse même d’en parler, de crainte de leur prêter vie. Les notes de coeur, elles, sont intactes. Elles font appel à nos passions toujours vibrantes. A nos espoirs toujours debout. Ô ce miel de réminiscence en nous, des pépites du nectar de la vie !

Sur la carte de nos rêves, au sommaire du livre de la vie, les souvenirs doux, autant que les amers et les doux-amers, ont un point fixe. Quand on les a repérés, il suffit de veiller à ne pas stationner trop longtemps près de ceux qui ne nous rendent pas vivants.

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