L'aube fleurie

L'aube fleurie

Oracle

Atelier de Ghislaine n°249

1.Insérer les 6 mots suivants dans le texte :

Pareil lorsque désormais futur raison dire

2. ou les 6 autres :

Jour clair crise parole voir entendre

3. ou insérer des mots commençant par "o"

 

J'ai travaillé les 3 propositions ensemble :

 

Homme qui regarde le lac 2

 

ORACLE

 

  C’est la fin du jour sur l’état d’Oregon. Orlando se promène tranquillement le long du lac, dont les berges doivent leur splendeur à la présence des saules, frênes, érables et peupliers ornés de leurs splendides couleurs automnales. En venant là, l’unique objectif d’Orlando était d’observer de nouveau attentivement la surface de l’eau claire au pouvoir si apaisant. C’est ce qu’il fait régulièrement, et ce qu’il s’apprête à faire encore en cette fin d’après-midi là, lorsque soudain, il perçoit un cri dans le ciel. Il lève la tête et voit passer une escadrille d’oies sauvages de forme oblongue. Les blancs volatiles viennent de surgir de derrière une rangée de sapins odoriférants. Instant magique qu'Orlando déguste avec bonheur. Ici, tout est calme et sérénité. Seuls les cacardements sonores des oiseaux migrateurs brisent le silence apaisant et presque religieux du site.

 

  Toutefois, à ce moment précis, les pensées méditatives d’Orlando sont troublées par sa vision obsessionnelle des diverses catastrophes climatiques en cours partout autour du monde. Les cataclysmes gravissimes les plus spectaculaires de tous les temps. Du moins aux dires des médias. Au point de plonger les civilisations occidentales dans l’effroi le plus total, les obligeant à traverser une crise existentielle majeure. Il faut reconnaître que c’est bien compréhensible eu égard aux circonstances : ondées transformées en un rien de temps en torrents dévastateurs, ouragans totalement imprévisibles, gigantesques incendies à répétition, éboulements, fissures géantes… On dirait que la terre chancelle.

  De quoi offrir à tout esprit curieux l’occasion de réfléchir : pourquoi tout cela ? Chaque jour c’est pareil. Les voix d’oraison funèbre des télévisions mondiales décrivent l’horreur avec force détails, et ne cessent de le dire : « il va falloir vous y faire. Désormais ce sera toujours ainsi, préparez-vous au pire ».

La force du message opère immédiatement dans les esprits apeurés. Des paroles difficiles à entendre, et des faits devenus ordinaires, cependant impossibles à voir pour les âmes les plus sensibles.

 

  Mais quelle est donc l’origine de tout ceci ? se demande Orlando. Sont-ce réellement les conséquences inéluctables des actions humaines responsables du réchauffement climatique ? Ou s’agit-il de l’œuvre du Divin qui veut punir « l’humanité pécheresse », ainsi que le prêchent d’un ton de plus en plus ostentatoire et outrancier certains orateurs religieux ? Ou bien, tout simplement, la planète est-elle en train de traverser un cycle de nettoyage, avant son renouveau ? Peut-être que pour cela elle s’ébroue énergiquement comme un chien secoue vigoureusement ses puces ?

 

  Quoi qu’il en soit de ces diverses considérations, le résultat est le même : une humanité impuissante malmenée par les éléments, tels des chatons imprudents se retrouveraient piégés dans le tambour d’un lave-linge.

 

  Orlando est encore en train de se poser la question quand il remarque quelque chose d’étrange : silence absolu tout autour de lui. Calme omniprésent. Pas un seul souffle de vent. Pas une once de mouvement parmi le vivant. Les feuilles des arbres ne bougent pas d’un millimètre. Aucun son d’oiseau, de mammifère, d’insecte ou de quoi que ce soit d’autre. Quant à la surface de l’eau, elle est parfaitement lisse, comme si elle avait gelé d’un seul coup.

 

  Orlando est un être profondément spirituel. En tant que tel, il aime se réfugier dans la solitude et le silence, mais cette fois, ce silence est vraiment trop intense pour lui. De quoi s'opérer sournoisement en lui une angoisse diffuse.

"Tout ceci n’est pas normal, se dit-il. C’est comme si les éléments s’étaient figés, comme si le temps s’était soudainement arrêté'.

 

  Après quelques secondes d’observation attentive en position statique, Orlando se remet en marche en sifflotant, comme pour briser au plus vite les parois opaques de cette ambiance sinistre. C’est alors que quelque chose d’inattendu le fait stopper net de nouveau : là, juste devant lui, un peu sur la gauche, un jeune peuplier se met à agiter ses feuilles en tous sens, visiblement à son intention. Tout le reste de la végétation demeure inerte et silencieux. Seul le peuplier semble animé de vie. Orlando n’a jamais rien vu de pareil. S’agirait-il d’une illusion d’optique ?

 

  La suite des événements va lui apprendre que non, ce n’est pas une illusion d’optique. Ou bien cette illusion d’optique s’accompagne d’une illusion auditive, car voilà maintenant qu’il se met à entendre des voix. Ou plutôt une voix. Une voix d’ogre soufflant comme le vent et qui résonne comme le tonnerre. Une voix grave et intimidante, mais bizarrement, apaisante en même temps :

 

« L’irrespect, dit-elle. La cause : l’irrespect. Le remède : le respect ». Respect des autres. Respect de la terre. Respect de la nature. Respect des animaux. Avant toute chose : respect de soi. Nul vent contraire sur la terre lorsque souffle le respect ». Oracle de mère Nature.

 

  Puis, la voix se tait, et aussitôt tout reprend vie. Quelques minutes plus tard, Orlando ne sait plus vraiment s’il a rêvé ou non, ou s’il a été victime d’une hallucination, tandis qu’il sent comme de petits coups de marteau indolores lui tambouriner l’occiput. En tout état de cause, ce dont il est absolument certain, c’est que la voix a entièrement raison. Il a envie d’en savoir plus, à présent. Il décide alors de croire que la voix entendue était bien réelle, et non le résultat de ses divagations mentales du moment. Il laisse de côté ce réflexe cartésien qui le retient encore de croire aux miracles, et il s’enhardit :

« Eh ho, la voix ! Ou bien dois-je te nommer oracle ? Tu es partie » ?

Le peuplier se met à trembler de nouveau, de toutes ses jeunes feuilles rousses, avant que la voix ne s’exprime :

« Je suis là. Que veux-tu ? ».

« Eh bien… j’aimerais en savoir plus… ».

 

La voix retentit alors avec encore plus d’intensité et de solennité :

Œil, oreille, nez, bouche, main, pied, tout l’organisme : dignes de respect.

Au sein des cellules de l’organisme : l’ADN,

Les informations de l’ADN : signature du corps.

Au sein du corps : particules du monde.

Le corps : temple de l’âme.

Le corps : temple du monde.

Respect du corps de chair, respect du corps terrestre, respect du corps céleste = respect de l’univers.

Union,

Paix,

Liberté,

Fraternité,

Harmonie,

Universalité éternelle et sacrée.

 

Voilà, maintenant tu sais. »

 

« Très bien, répond Orlando d’une voix timide, j’ai compris. Mais alors, maintenant, que faut-il que je fasse ? Qu’attend-on de moi ? »

 

« Non pas à l’extérieur, mais toujours à l’intérieur », répond l’oracle.

Paix à l’intérieur = paix à l’extérieur.

Vis-le, et témoigne ».

 

Aussitôt, la voix se tait, définitivement cette fois, tandis que tout reprend vie. Au loin, retentit la cloche du village. Par trois fois. Surpris, Orlando consulte sa montre. Il est très exactement 17h39 au troisième tintement, au moment même où le soleil disparaît derrière l’horizon, englouti dans les eaux sombres du lac, tandis qu’une autre lumière venue de nulle part, plus intense et plus pure, est en train de s’étendre progressivement à la surface des eaux et tout autour de lui…

 

MPV

 

 

 

 

 

 

 

 



07/11/2024
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