L'aube fleurie

Atelier de Ghislaine n°170

Mots à insérer :

Rengaine, menteur(euse), aisance, reproche,

souffle, prochain, certain, jalouser.

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Texte avec des mots commençants par C

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Un ressenti sur le thème " Temps "

   Elodie a tout préparé dans les moindres détails, comme toujours. Elle aime faire les choses correctement. Tout le temps. C’est presque un réflexe chez elle, c’est en tout cas une règle de vie. Elle aime les challenges et se complait dans la difficulté, alors la tâche n’est pas toujours aisée. Mais jamais, ô grand jamais, elle ne pourrait faire autrement. Agir dans la précipitation sans avoir pesé le pour et le contre de ses actes ? Surement pas ! Se lancer tête baissée à l’aveuglette sans être certaine du résultat ? Encore moins ! Envisager la possibilité d'un échec ? Que nenni ! « Je n’ai rien contre la spontanéité, a-t-elle dit un jour à Thomas, son cher et tendre, mais il faut qu’elle soit encadrée ». Ce dernier a haussé les épaules et lui a répondu qu’elle était en train de dire n’importe quoi, que ses propos étaient complètement contradictoires, absurdes. Ce qui ne l’a nullement convaincue, mais au contraire, l’a renforcée dans ses convictions.

   Thomas a une personnalité totalement opposée à celle d’Elodie. C’est plutôt quelqu’un de décontracté, voire un peu nonchalant, parfois. Il ne se soucie jamais de rien, ne sait d’ailleurs même pas ce que le mot « souci » signifie. Quand il voit Elodie se démener en tous sens comme une abeille dans sa ruche, l’œil rivé sur la pendule pour respecter un horaire que personne ne lui a imposé, hormis elle-même, il ne peut s’empêcher de rire. Ce qui énerve Elodie, et lui le fait rire encore plus. Immanquablement elle se fâche, lui reproche son « j’menfoutisme », son manque de maturité, son dilettantisme. Comme il ne répond pas, attendant patiemment la prochaine critique, ça dégénère. C’est toujours la même rengaine. Réglé comme du papier à musique. Ensuite, tout y passe : son manque d’ambition, de sérieux, de volonté, d’organisation… D’aisance dans la société, a-t-elle-même ajouté un jour. « D’aisance dans la société ? Qu’est-ce que ça vient faire là, ça ? Quel rapport ? a-t-il voulu savoir sans grande conviction toutefois, mais hilare. « Oui, d’aisance dans la société, parfaitement, et c’est pour ça que tu restes avachi à longueur de journée sur ce fauteuil, devant tes jeux débiles ! » a-t-elle eu le culot de lui répondre avec une incommensurable mauvaise foi destinée à rendre logique l’illogique. « Tu as peur de te confronter à la réalité de la société, parce que tu es asocial, tout simplement. » Il l’a déjà entendu, ce discours, ô oui ! Des dizaines de fois ! Elle est tellement prévisible dans ses jacassements de perroquet qu’il pourrait les lui préparer à l’avance pour lui économiser de la salive. Mais il ne le fait pas, ô non, c’est bien trop amusant !

   Quand de temps à autre il ose lui répondre qu’elle a tort, qu’elle se trompe du tout au tout, elle ne se démonte pas le moins du monde, et va jusqu’à lui souffler dans les narines, de son haleine fielleuse de harpie, qu’il est un fieffé menteur. Ensuite, elle lui reproche à lui de la jalouser, elle. Un jour, elle lui a dit mot pour mot en le regardant droit dans les yeux : « Tu fais tout ce que tu peux pour que je devienne comme toi : un coussin de canapé. Tout ça parce que tu sais que tu ne pourras jamais te hisser à mon niveau. »

  Le métronome que Thomas a mis en marche aujourd’hui, avant de prendre sa guitare, rythme à présent les décibels plus ou moins accentués de leur dispute coutumière. Thomas se demande encore combien de temps il va pouvoir supporter ce rituel maudit, dont il sait par ailleurs qu’il ne pourrait se passer. Car c’est ainsi qu’ils fonctionnent, Elodie et Thomas, ils s’aiment comme chien et chat.

  Le temps, parfois, est une toile d’araignée dont on ne sait qui, de l’araignée ou de la proie est le plus prisonnier.

MPV