Amis pour la vie
- Texte avec des mots finissant par « aire »
- Texte sur le thème de la confiance
- Texte commençant par « je ne peux oublier » et finissant par « mais(ou)que je pardonne
J'ai regroupé les options 1 et 3 :
Je ne peux oublier ce jour où l’amitié me trahit un instant, pour revenir vers moi l’instant suivant, se dit gaiement Tino le zèbre.
Un matin de printemps, l’âne Paco, son ami, était venu lui rendre visite, de l’autre côté de la grille du zoo, comme tous les jeudis à la même heure. C’était un rendez-vous que l’un et l’autre n’eurent manqué pour rien au monde. Mais ce jour-là, avant même que Tino ne prononçât un seul mot en voyant son ami s’approcher, ce dernier lui lança sur un ton autoritaire assorti d’un regard incendiaire :
- Pas de commentaire, s’il te plaît !
- Paco ? C’est bien toi ? Il me semblait bien t’avoir reconnu, malgré ce regard noir et cet accoutrement, répondit Tino, les yeux rieurs. Tu t’es déguisé pour le carnaval ?
- Cet « accoutrement », dis-tu ? Alors ça, c’est la meilleure ! Parce que sur toi, ça s’appelle une robe princière, mais sur moi c’est tout le contraire, c’est bien ça ?
- Je n’ai jamais dit ça, Paco, c’est juste que…
- C’est juste que quoi ? Ta réponse n’est pas claire, mon pote. Vas-y, dis-moi ce que tu penses, qu’on puisse classer l’affaire une bonne fois pour toutes. Cet habit ne me va pas, c’est ça ?
- Eh bien…non…ce n’est pas ça… Ce que je pense, c’est simplement que c’est contraire à ta nature, ces rayures. Avoue que ce n’est vraiment pas ordinaire.
- Et pourquoi on ne pourrait pas changer sa nature ? Ce que tu peux être sectaire, mon pauvre ami…
- Non, ne sois pas fâché, Paco, je ne voulais pas me montrer désagréable. Désolé si je t’ai blessé. Qui t’a dessiné ces jolies rayures ? Elles sont très réussies, et elles te vont très bien, tenta de se rattraper Tino, à présent tout penaud.
- Une esthéticienne de l’institut Sainte-Claire. Il y avait une offre promotionnelle sur les rayures : deux euros la paire, tu te rends compte ? C’était inespéré !
- C’est super, Paco, mais es-tu bien sûr que cette teinture est fiable et sans danger ? Ne risques-tu pas de faire une crise d’urticaire?
- Non, non non, j’ai demandé conseil à mon vétérinaire, il m’a assuré que c’est sans danger et que je pouvais y aller en toute confiance. Il faut seulement que j’évite de sortir quand il pleut. Forcément, comme c’est de la teinture éphémère…
- Oui, forcément, répéta Tino, retenant un fou rire.
Ce dernier ne put toutefois s’empêcher d’ajouter une remarque amusée :
- Eh bien, à partir de maintenant, tu ne vas pas sortir souvent, toi qui habites en Normandie. Tu as pensé à t’acheter un parapluie, au moins, pour pouvoir venir me voir ?
- Bah, et toi ? Tu n’habites pas en Normandie, peut-être ? Tu en as un, toi, de parapluie ?
- Tu oublies un détail loin d’être secondaire, mon ami : moi, c’est ma nature d’être rayé. Mes rayures ne vont pas disparaître à la première averse.
Piqué, Paco lui répondit vertement :
- Oui mais moi, au moins, je peux aller et venir où je veux, quand je veux. Alors que toi, tu es confiné dans ce zoo jusqu’à la fin de ta vie.
- Ça, ce n’est pas très gentil répondit tristement Tino. Moi qui te croyais mon ami…
- Pardon, s’excusa aussitôt Paco, se rendant compte de son aigreur, je dis n’importe quoi. La vérité, c’est que… je me sens fade et ordinaire à côté de toi. Je passe inaperçu. J’ai voulu te ressembler, voilà tout.
- Mais ce n’est pas vrai, voyons…tu es tout sauf ordinaire. Ta robe unie est très jolie. Moi j’aime beaucoup ce gris souris. Et puis, tu as une personnalité extraordinaire. Bien peu d’animaux osent tenir tête ainsi aux humains qui les contraignent à avancer l’échine lourdement chargée, sous la menace du bâton. Alors que nous, les zèbres, nous voilà contraints de rester parqués dans des zoos, à la merci de leurs caprices arbitraires, de leur bon vouloir et de leurs gestes débonnaires pour notre nourriture hebdomadaire.
- C’est vrai ? c’est ce que tu penses de moi ?
- Mais bien sûr ! tu ne peux t’imaginer le nombre de fois où j’ai rêvé d’être comme toi. Sans rayures, mais libre.
- Paco lança vers son ami un regard étonné et ravi.
« Alors ça, si je m’attendais »…se dit-il
- Allez mon ami, fit Tino, laissons là ces querelles sans queue ni tête, avec ou sans rayures, et profitons pleinement de l’instant présent. Qu’en penses-tu ?
- D’accord, Tino, tu as raison. Excuse-moi encore.
- C’est déjà oublié. Raconte-moi plutôt ta semaine, répondit ce dernier.
Avant même que Paco eût pu prononcer un seul mot, une averse soudaine fondit sur les deux amis, qui éclatèrent de rire en même temps. Il ne fallut pas longtemps pour que les jolies rayures de Paco se diluent dans l’eau de pluie, faisant réapparaître peu à peu sa belle robe grise. Mais à présent, l’âne s’en moquait éperdument. Il commençait déjà à s’aimer tel qu’il était.
Tino perçut aussitôt le changement de point de vue de son ami dans l’éclat de son nouveau regard. Plus tard, il considèrerait cet épisode devenu légendaire comme une belle leçon de vie. Pour l’heure, lui vint une pensée qui le fit sourire : « le ciel se moque bien de tout ça. Lui, il reste toujours le même : libre et imprévisible. Que je décide de garder rancune ou que je pardonne ».
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