Un Noël pas comme les autres (6ème et dernier épisode)
Pour la première fois depuis des mois et des mois, Jeanne se réveilla à la lueur du jour, le corps entièrement reposé, le cœur apaisé. A la seconde où elle ouvrit les yeux, elle eut tout de même une appréhension. Elle n'osa tourner la tête, de peur de constater qu'elle avait rêvé tout ça. Elle étendit simplement la main et là, fut rassurée en sentant la chaleur de son corps sous ses doigts. Elle tourna la tête vers lui et sourit, attendrie, en le voyant paisiblement endormi.
Comme s'il avait senti l'appel de ses yeux amoureux, Paul ouvrit un œil, puis l'autre, et la vit penchée au-dessus de lui, émerveillée comme aux premiers instants de leur premier amour. En cette seconde d'éternité, il remercia le ciel, et Dieu, et les anges, et tout ce qui avait pu contribuer, d'une manière ou d'une autre, à ce qu'ils se retrouvent.
- Bonjour mon amour, lui dit-il tendrement.
- Bonjour mon amour, répondit-elle en se noyant au fond de ses yeux.
- Viens là, fit-il en soulevant son bras.
Elle se lova tout contre lui et de nouveau, eut la sensation de se réchauffer de l'intérieur à la chaleur de son corps. Puis leurs bouches se turent…
Après ce moment de tendresse enfiévrée, Jeanne redescendit un instant de son petit nuage pour revenir à la réalité :
- Il faut que j'appelle les enfants pour leur annoncer la nouvelle de ton retour.
- Pas la peine.
- Comment ça, pas la peine ?
- Ils sont au courant.
- Ils sont au courant…répéta-t-elle, perplexe.
- Je les ai appelés avant de venir. Ils voulaient te faire ce cadeau. Ils voulaient que ce réveillon de Noël soit le plus beau de tous pour toi.
- …
Jeanne resta sans voix. Sa gorge se noua, des larmes d'émotion brouillèrent sa vue.
- Seul Thibault n'est pas au courant. Je n'ai pas réussi à le joindre, toutes les lignes sont coupées là-bas.
- Tu veux dire…fit Jeanne, en tentant de maîtriser le tremblement de sa voix, que les enfants sont restés chez eux pour nous permettre, à toi et à moi, de nous retrouver ?
- Tu crois qu'ils t'auraient laissée réveillonner seule autrement ? Pour Thibault, je comprendrais, il habite très loin d'ici, mais pour Léa, François et Pat…
- Je n'en reviens pas…
- Nous avons des enfants formidables, chérie.
- Oui, tu as raison. Bon, alors il me reste à prévenir Thibault.
- Je t'en laisse le soin.
Jeanne se leva et se rendit au salon, où elle saisit immédiatement le téléphone. Thibault décrocha à la première sonnerie.
- Maman ? Je m'apprêtais justement à t'appeler ! l'entendit-elle répondre d'une voix enjouée, avant même qu'elle ait eu le temps de lui dire bonjour.
- Bonjour mon Thibault, tu as l'air en forme, dis-moi ! Thibault, j'ai une nouvelle à t'annoncer…
- Moi aussi maman, j'ai une nouvelle à t'annoncer.
- Si tu permets, je vais parler en premier, parce que la mienne est de taille.
- Excuse-moi de te contredire maman, mais ta nouvelle ne peut pas être plus importante que la mienne, alors si tu permets, je vais commencer.
- …
Jeanne ne s'attendait pas à ça. Surprise et intriguée, elle répondit donc :
- Très bien alors…je t'écoute.
- Maman, je crois que je l'ai devant moi…
- … Quoi ? Qu'est-ce que tu as devant toi ?
- Non, pas quoi, mais qui.
- Très bien, alors qui ?
- La femme de ma vie.
- …Tu as rencontré quelqu'un ? … Mais c'est formidable ! Et si c'est la femme de ta vie, Thibault…je suis la plus heureuse des mères ! Raconte-moi…
- Pas encore maman, pas encore. Et toi ? C'est quoi ta nouvelle ?
- Eh bien…confidence pour confidence…je crois que je l'ai devant moi.
- Maman…je vois que tu as retrouvé ton humour, c'est bien ! Alors, dis-moi, qu'as-tu devant toi ? Un sapin de Noël ? La bibliothèque de tes rêves ? Mmm… mon cadeau peut-être…
- Non, pas quoi, mais qui.
- Tu m'intrigues là, qui ça peut bien être à 9h du matin ?
- L'homme de ma vie.
- … Tu as rencontré quelqu'un maman ? Mais c'est super ça ! Je suis content pour toi.
- Non, tu n'as pas compris…J'ai dit l'homme de ma vie, Thibault.
- …
- J'ai dit l'homme de ma vie.
- Maman… j'ai peur de comprendre, ou plutôt… je n'ose comprendre…
- Ose mon grand, ose.
- Tu ne veux pas dire que c'est…
- Papa, oui. Tu peux prononcer le mot.
- Papa ? Papa est revenu ? Mais comment…mais…
- Il est revenu, et je peux te dire que j'ai passé une soirée de réveillon au-delà du bonheur.
- Maman… tu ne peux pas savoir le cadeau que tu me fais là. Le mien, de réveillon, a été fabuleux, mais ce que tu m'offres là, en prime…
- Je sais Thibault, je sais…Alors profite bien de ton bonheur. Je t'embrasse et je te passe ton père.
- Toi aussi maman, toi aussi, profite bien de ton bonheur.
Thibault, ému, reprit avec son père la conversation que les deux hommes avaient laissée en plan un an avant, sous l'œil attendri de Jeanne, qui jamais, pas un seul instant, n'avait abandonné…
FIN
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