L'aube fleurie

OSMOSE MAGIQUE

  À vous, je peux bien le confier : j’affectionne particulièrement la marche en solitaire, dans la campagne ou dans les bois. Je m’adonne à ce plaisir simple aussi souvent que possible. Randonner tout seul est bonheur ultime. On se sent beaucoup plus enthousiaste que lorsque l’on visionne une vidéo sur Internet ! Dame Nature est si belle ! Séduisante comme personne ! Comment pourrais-je réprimer ce désir d’en connaître davantage sur elle, en me réservant de précieux instants seule à seule avec elle ? Quand résonne en moi son appel insistant, il m’est impossible d’y renoncer, même quand je suis fatiguée. En Gaïa, tout m’étonne et me ravit, elle a tant de mystères à révéler ! C’est une erreur de penser que Dame Nature veut à tout prix garder ses secrets pour elle seule. Au contraire, elle est si bonne qu’elle n’attend que le moment de les partager avec nous. Quand on y songe, c’est proprement fabuleux !

   Observons, par exemple, le travail d’une araignée. Quoi de plus fantastique que cette toile qu’elle façonne, puis festonne avec fébrilité, art et patience ? On dirait de la dentelle. Aucun tissu humain, aussi précieux soit-il, ne peut l’égaler en beauté ni en solidité. Quand la rosée et le soleil se font complices de cette œuvre fabuleuse, dans le petit matin frileux, elle étincelle de mille petits diamants qui font briller nos yeux.

  Laissez-moi vous faire un nouvel aveu : tout ce qui vit sur terre, dans  les airs ou dans les eaux fait briller d'émotion mon regard attentif. Il m'arrive parfois de me sentir submergée par une vague de tendresse, lorsqu’au détour d’un sentier forestier je découvre une jolie jacinthe au parfum envoûtant, isolée de ses sœurs, mais trônant comme une princesse au milieu des brins d’herbe couleur vert tendre, qui l’entourent amoureusement de leurs bras protecteurs. Il serait cruel de ma part de vouloir les démêler, car ils sont connectés, soudés, en osmose. Brins d’herbe et fleur vivent, respirent, soupirent ensemble sur Gaïa la généreuse, qui les abreuve de sa tendresse, sous le regard bienveillant des arbres séculaires qui les protègent de la chaleur. Car les rayons parfois trop forts du soleil, qui lui-même les chérit passionnément, pourraient flétrir leur beauté.

  Rien de faux dans la nature. Rien de superficiel. Tout est pur et sincère, beau, élégant, généreux, spontané. Tout est merveilleusement organisé. Tout a son utilité. Tout est fondamentalement authentique. C’est pourquoi l’on ne peut que s’y sentir bien, si toutefois l’on observe attentivement autour de soi, si l’on regarde Gaïa au fond des yeux, au fond de l’âme. Dame Nature nous pardonne tout, mais elle n’offre vraiment son cœur qu’à ceux qui lui témoignent une affection sincère. Elle connaît mille manières de nous montrer son amour, et quand nous en découvrons une, nous ne pouvons nous empêcher d’en claironner partout le divin prodige. La couleur du ciel, de l’eau et de la verdure est pur prodige. Le subtil parfum d’une fraise des bois est prodige. L’air que l’on respire est prodige. Ce lever de soleil auquel on s’abandonne en fermant les yeux est prodige. Tout dans la nature est prodige. Et quand on entretient sa relation avec elle, ces divines sensations nous deviennent familières.

   Il peut même arriver, parfois, lorsque l’on ferme les yeux pour enlacer un arbre, de sentir vibrer en tout son être la puissance de l’univers tout entier. C’est là un ressenti extraordinaire. C’est là l’ultime cadeau de notre généreuse Gaïa pour nous. C’est fantastique et miraculeux. Nul besoin d’être chaman pour vivre cette osmose magique. Nul besoin non plus de cérémonie mystique, de pierres, de plumes, de bougies, de tambours, de ferventes prières ni de rites fantasmagoriques. Pour faire vibrer son âme en osmose avec celle de l’univers, il faut juste ouvrir ses yeux, ses oreilles, ses narines et son cœur.

MPV