L'aube fleurie

Ton sourire, un jour, est venu

Et ta voix résonne en mon âme,

Elle a percé mon cœur à nu,

A ravivé en moi la flamme,

Que l’ombre, un temps, avait tuée

En un souffle au parfum de souffre,

Habitante des lieux hantés,

Visiteuse des sombres gouffres,

Qui aime vivre et parader

En nos crédules cœurs blessés,

En nos amours assassinées,

En nos révoltes étouffées.

Mais un matin sifflé en joie,

Par quelque merle au timbre pur,

J’ai entendu tes mots de soie

Glisser sur la tendre verdure.

Les papillons en ont tremblé,

Tant ce son était merveilleux,

Tant à l’amour il ressemblait,

Quand il n’attend qu’un rêve à deux.

Dans une perle de rosée,

Abandonnée à l’aube pâle,

J’ai vu tes yeux se refléter,

Et ton beau sourire amical.

Alors le vent s’est arrêté,

Pour qu’en mon cœur je puisse entendre

Ta dernière larme rouler

Dans un sillon de l’herbe tendre.

Alors le temps s’est arrêté,

Alors l’horizon s’est ouvert,

Sur une édénique vallée,

Que n’assassine aucun hiver,

Où souffle une brise tendresse,

Enveloppée de blanc jasmin,

Et où frémissent d’allégresse

Les roses d’un bonheur divin,

Où coule la rivière amour,

En son doux lit de pierres pâles,

Qui donne à ses eaux de velours

Ces beaux reflets de pur cristal,

Où la forêt entonne un chant

Si doux, si fort, si mélodieux,

Qu’il ensorcelle l’océan

Et fait pleurer même les dieux.

Car c’est un chant à l’unisson,

Du bonheur fou de l’amitié,

Qui ne connaît pas les saisons,

Ni la longueur, ni les années,

Un chant qui perce les échos

Des sons terribles du canon,

Un chant qui éteint le ronron

Des rumeurs noires des bas-fonds,

Un chant à l’étrange silence,

Aux belles notes d’espérance,

Que seul entend celui qui pense

Que sur notre chemin d’errance,

Au creux des ombres de la nuit,

Auprès des spectres de nos vies,

Dans le sourire d’un ami,

On peut goûter à l’infini…

 M