Journal d'une terrienne 28/03/2020 : Covid 19
Cher journal,
Depuis le premier jour où j’ai commencé à noircir tes pages jusqu’à aujourd’hui, je ne pensais avoir un jour à vivre quelque chose d’aussi terrible.
Je crois que nous vivons l’époque la plus étrange que notre planète ait connu à travers les âges. Au dernier acte de cette grande tragédie qu’est notre humanité si criminelle envers la nature et les espèces animales, nous pensions finir par être ensevelis sous les eaux fondues de la calotte glaciaire, brûlés dans un gigantesque incendie, ou emportés par une tornade géante ou un tsunami, et nous voilà terrassés par un ennemi microscopique, invisible, incolore, inodore, et terriblement agressif.
La menace n’est donc pas venue de l’extérieur de notre corps, mais de l’intérieur, une fois que le petit intrus s’est installé. Ceci ne devrait-il pas nous interpeller, sachant que Covid 19 et peur sont maintenant indissolublement liés ? La pire menace qui nous guette toujours, n’est-elle pas la peur ? Et la peur elle-même n’est-elle d’abord intérieure ?
Coronavirus : virus couronne ? Virus couronné ? Quoi qu’il en soit, il est le roi de l’année 2020, il règne en ce moment sur l’humanité devenue son valet tremblant et obéissant. C’est le Roi de la peur, cette peur qui fait baisser les têtes, dévaliser les magasins, réveiller parfois les instincts les plus vils et craindre le pire. Certains d’entre nous ont même l’impression d’abriter en eux-mêmes une bombe à retardement.
N’est-ce pas là un formidable sujet de réflexion, à une époque où le monde est au bord de l’implosion ? Un tout petit être vivant, qu’il soit réellement ou virtuellement présent en nous, est capable à lui tout seul de stopper toute l’activité économique mondiale. Si l’humanité ne se remet pas en question maintenant, elle ne le fera jamais. Pour l’instant, chacun a le nez levé vers cette épée de Damoclès qui flotte au-dessus de chaque tête. Chacun (à part quelques derniers récalcitrants) respecte scrupuleusement les consignes de confinement, pour se protéger, pour protéger ses proches, et aussi toutes les personnes fragiles pour lesquelles une contamination serait dramatique.
C’est une très bonne chose que chacun ait pris la juste mesure de la menace. Mais quand celle-ci aura disparu, saurons-nous tirer les leçons de cette détestable expérience ? Serons-nous encore capable de réfléchir et d’accepter l’idée que nous devons changer de paradigme de toute urgence si nous voulons sauver notre planète ? Car si nous ne le faisons pas maintenant, d’autres virus viendront, et encore et encore, et finiront un jour ou l’autre par ne plus nous laisser aucun répit.
Ce virus, véritable arme de destruction massive, ne serait-il pas en train de nous dire, à l’intérieur de nous, tandis qu’à l’extérieur l’air commence à se dépolluer de l’absence d’avion dans le ciel et de voitures dans les rues, ce que nous refusions d’entendre jusqu’ici ? Vous êtes en train de vous autodétruire par vos activités humaines déshumanisées et débridées. Ne serait-il pas en train de nous dire : revenez à de vraies valeurs, respectez le vivant et le vivant vous respectera ? Ne serait-il pas en train de nous donner un conseil : ne regardez plus seulement votre nombril, mais aussi les peuples qui souffrent depuis longtemps, les animaux qui souffrent depuis longtemps, la terre qui souffre depuis longtemps. Que vaut un petit confinement de quelques semaines à côté de cette souffrance qui perdure depuis des générations et des générations ?
Et si nous profitions de cette occasion de confinement, qui n’est pas un emprisonnement, mais une précaution indispensable pour notre propre salut et celui des autres, pour réfléchir à tout cela ? Notre conscience ne nous parle-t-elle pas en ce moment, à nous, humains ? Ne nous invite-t-elle pas à cette prise de conscience qu’en réalité tout se joue en premier à l’intérieur de soi ? Que la décision de l’ensemble est d’abord individuelle ? Gandhi l’a bien dit : « sois le changement que tu veux voir dans le monde ». Le changement ne viendra pas d’une cause extérieure, il viendra de notre être intérieur et de la reconnaissance de notre unité. En nous renvoyant chez nous, cette crise sanitaire mondiale inédite est en train de nous dire : entrez à l’intérieur de vous-même, réfléchissez à ce que nous avez fait, vous, humains, prenez la mesure de ce qu’est la maltraitance du vivant. Prenez conscience également que vous êtes tous UN et donc interdépendants. Ce qui arrive à l’un d’entre vous, chacun des autres le ressent. Est-ce clair dans vos esprits à présent ? Avez-vous compris maintenant que tout acte commis en ce monde a des répercussions partout ? Quand on méprise, puis qu’on brise le circuit de la chaîne alimentaire, quand on sort les espèces animales de leur environnement pour les emprisonner ailleurs avant de les décimer, voilà ce qui arrive. Puisque tous les êtres vivants de cette planète sont interconnectés, ce qui arrive aux uns arrive aux autres. Si vous faites du bien à la nature, la nature vous fait du bien. Si vous lui faites du mal, vous en ressentez les douleurs. Tout ceci n’est que jeux de miroirs qui ne font que répondre à une logique imparable.
Pourtant les hommes croient encore pouvoir s’affranchir des règles du vivant. Ils sont déjà en train de calculer comment ils vont pouvoir relancer l’économie à l’issue de cette terrible crise. C’est une bonne chose de continuer à se projeter dans l’avenir, c’est une façon de dire « je garde espoir, je crois en demain », mais les hommes tireront-ils vraiment les leçons de ce qu’ils auront enduré ? Seront-ils conscients de la nécessité absolue de repartir sur de nouvelles bases, radicalement différentes de celles qu’ils ont instituées jusqu'à présent ? Seront-ils prêts à changer de paradigme ?
L’avenir nous le dira, cher journal.
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