Enfance
La pire chose que l'on puisse faire subir à un enfant, c'est de le priver d'enfance.
L'enfance devrait être la période sacrée de la vie. La naissance d'un bébé est un cadeau merveilleux, le plus beau des cadeaux. Que nous le considérions comme un cadeau de Dieu, de la vie ou du destin, il nous appartient d'en prendre soin, de le chérir, de lui offrir le meilleur et notamment, et surtout, les atouts et les armes dont il aura besoin pour survivre, grandir et évoluer tout au long de sa vie.
Mais nul n'est besoin de donner ces conseils à une mère ou à un père dignes de ce nom car l'amour, l'attention et les gestes tendres que l'un ou l'autre a envers son enfant sont, dans la plupart des cas, innés, instinctifs, évidents. En ce qui concerne l'attachement qui lie une mère à son enfant, on parle d'instinct maternel. Le fait que cette dernière porte l'enfant neuf mois dans son ventre, qu'elle puisse suivre et percevoir, mois après mois, son évolution et le sentir bouger en elle, y est sûrement pour quelque chose. C'est une sensation merveilleuse, presque magique, que rien ne peut égaler. C'est la vie dans la vie. Pendant quelques mois, c'est la fusion totale, une symbiose étrange, presque magique, que l'on ne revit jamais plus, sauf bien sûr, lors d'une nouvelle maternité.
L'enfance est une période privilégiée de la vie. L'évoquer ne peut nous laisser indifférents, que nous soyons parents ou non. Car nous avons tous étés des enfants, avec nos expériences d'enfant, nos espoirs d'enfant, nos peurs d'enfant. Les différents stades que vivent nos propres enfants, et les bouleversements qui les accompagnent bien souvent, nous les avons vécus avant eux, parfois sereinement, parfois douloureusement. Et nous sommes devenus, de stade en stade, les hommes et les femmes que nous sommes aujourd'hui, avec, en capital définitif, la somme de toutes les expériences que nous avons vécues. On comprend un jour pourquoi prendre soin d'un enfant c'est prendre soin de son âme, et pourquoi blesser un enfant, c'est blesser son âme.
Au cour de mon expérience en tant que juré de Cour d'Assises, j'ai été frappée, d'affaire en affaire, par un phénomène récurrent : les accusés, tout violent, pervers ou dangereux qu'ils fussent, étaient, dès la minute où ils entraient dans le box pour faire face à la cour, redevenus des enfants. Ils baissaient la tête, tremblaient, pleuraient comme des enfants s'apprêtant à recevoir un châtiment de la part de leurs parents. J'ai compris alors pourquoi, au tout début de la session, on nous demandait de juger sans haine ni pitié mais de la manière la plus impartiale possible. J'ai compris également que c'était là la seule manière digne et raisonnable de juger.
Il existe malheureusement, de par le monde, des enfants qui n'ont pas d'enfance. Certains ont la malchance de naître dans des pays pauvres. Ceux-là, souvent livrés à eux-mêmes, quand ils ne sont pas exploités honteusement, attelés à des tâches inhumaines ou abusés sexuellement, sont contraints de se débrouiller quotidiennement pour survivre. Ils sont parfois atteints de maladies graves et errent ainsi, sans force, sans but, sans que personne ne veille sur eux. Ils peuvent être également enrôlés de force dans des armées, dès l'âge de huit ans, et contraints à tuer !
Ces enfants sans enfance, il en existe également, hélas, dans nos pays développés. Ceux-là sont humiliés, battus, parfois même torturés, violés, affamés, enfermés dans des placards, dépréciés, niés. On les retrouve parfois, des années plus tard, sur le banc des accusés, après qu'ils aient eux-mêmes, à leur tour, déprécié, nié, battu, violé ou même tué. C'est un cercle vicieux devant lequel nous nous sentons impuissants et tristes.
Etre conscient, à chaque instant, d'une chose essentielle, vitale : prendre soin d'un enfant, c'est prendre soin de son âme, blesser un enfant, c'est blesser son âme.
A jamais.
M.
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