L'aube fleurie

Pour un tas de vieillies pierres

Au passé légendaire,

Au charme sulfureux, parfois...

Homme fier, tu déploies

Des trésors d'expérience,

De force et d'endurance,

D'ardeur et de courage,

Tandis que font naufrage,

À deux pas de chez toi,

Dans la faim, dans le froid,

Des familles entières,

Accablées par la misère.

Homme, as-tu perdu l'esprit ?

Depuis quand le granit,

Le calcaire ou l'argile

Ont-ils plus d'importance

Qu'un être humain qui pense ?

Quel dieu l'a ordonné ?

Quel saint l'a approuvé ?

À part le dieu Mammon

Et le saint Déraison ?

Homme passionné d'histoire,

Tu voudrais nous faire croire

Que l'enjeu est de taille,

Qu'il faut livrer bataille.

Homme, as-tu perdu ton âme ?

Toi, tu es plein d'émoi

Pour un mur qu'on abat,

Mais tu restes de bois

Quand il pleure devant toi,

Cet enfant innocent,

Balloté par les vents

De la peur, de la haine,

Submergé par la peine.

Tu prétends impossible

De lui offrir asile,

Mais tu donnes ton argent

Pour des temples branlants.

Homme, as-tu encore un cœur ?

Moi je pense que oui,

Mais tu n'as pas compris,

Ou peut-être pas appris

La valeur de la vie.

Homme, tu sais, l'histoire,

Tout comme la mémoire,

C'est l'être humain qui l'a fait,

De son cœur qui battait.

Aucun temple, aucun palais

N'est de génération spontanée.

La splendeur d'un édifice,

C'est son âme conceptrice.

Homme, ton cœur le sait déjà...

Reprends donc tes esprits.

Que tes sens interdits

Se réveillent et revivent,

Pour la mémoire vive

De ceux que tu veux honorer,

Par les pierres érigées.

Ne confonds pas les lieux magiques

Avec ceux qui en furent la musique,

Par leurs âmes unies

Sur plusieurs décennies.

Respecte la vie avant tout

Et les pierres resteront debout.

Homme, ouvre ton cœur.

 M