L'aube fleurie

L'aube fleurie

La liberté / Freedom

   Le mot « liberté » a peut-être été inventé par l'homme pour tenter d'expliquer ce qu'il n'est pas, un être libre, et pour trouver les moyens de le devenir.

   L'oiseau est libre, qui vole d'un point à un autre sans se poser de questions. Le ciel tout entier est son espace. Ne dit-on pas d'ailleurs « libre comme l'oiseau ? »

   Le lion est libre, qui se déplace comme il le désire dans la savane, sans craindre d'approcher les campements des humains. Il semble que la nature toute entière lui appartienne.

  Et l'homme alors ? Est-il libre ? Puisqu'il ne peut habiter ni même seulement, parfois, visiter tout l'espace qu'il désire, sauf bien sûr, s'il présente les papiers que d'autres hommes ont bien voulu lui accorder. Un homme ne peut choisir d'habiter un autre pays que celui où il est né, l'oie sauvage oui, qui parcourt des milliers de kilomètres lors des grandes migrations. L'animal serait-il donc plus libre que l'humain ? Ou bien la liberté qu'évoque l'être humain se situe-t-elle à un autre niveau ?

   La liberté ne se heurte-t-elle pas toujours aux limites que lui imposent le respect de l'autre, la justice,  l'équité ? Si la liberté nous commande de nous rendre où bon nous semble et de traverser le salon de notre voisin sans son accord préalable, alors nous violons son espace privé, ce qui constitue un manque de respect. Mais si nous choisissons d'exercer égoïstement notre liberté sans nous soucier de nos concitoyens injustement condamnés et privés de la leur, nous n'agissons pas avec justice. Si en tant qu'êtres libre de nos choix, nous privilégions quelques individus au détriment des autres, sans que les uns ou les autres soient aucunement coupables de quoi que ce soit, nous manquons d'équité.

   S'il veut continuer à vivre en société, l'être humain a un devoir de respect, de justice et d'équité. Il est courant d'affirmer que l'homme a droit à la liberté (toute relative, nous l'avons vu). Mais quand il l'a acquise, cette liberté lui commande également des devoirs : le respect de la liberté d'autrui, de la justice, de l'équité, et des actions entreprises pour les faire respecter.

   La liberté qui s'approprie l'espace de l'autre en lui déniant tout droit d'en profiter, n'est plus liberté mais colonialisme. La liberté qui s'impose à soi-même, pour soi-même et uniquement pour soi-même, sans souci de la liberté d'autrui, n'est que pur individualisme.

   La liberté est le droit inaliénable de chacun, un droit qui ne connaît d'autre frontière que celle du respect de l'autre. Liberté qui dénie à autrui sa propre liberté, celle de penser, d'exprimer sa pensée, de se mouvoir, s'annule donc elle-même, puisqu'elle trahit sa propre raison d'être.  Ne peut être libre celui qui dénie la liberté de l'autre et qui pour ce faire, crée ses propres limites et ses propres liens, ceux de l'homme écartelé entre sa perception idéale de la liberté et l'application de ses principes au sein de la société qui l'héberge.

   Existe-t-il de plus beau poème que celui de Paul Eluard, pour décrire cette liberté qui, de tous temps, a fait tant couler d'encre et de sang ? Je ne le pense pas. Je crois que tout le monde connaît ce merveilleux poème, pourtant je ne résiste pas au désir de le citer ici, de le lire et le relire :

 

 

 

 

Sur mes cahiers d'écolier
Sur mon pupitre et les arbres
Sur le sable sur la neige
J'écris ton nom

Sur toutes les pages lues
Sur toutes les pages blanches
Pierre sang papier ou cendre
J'écris ton nom

Sur les images dorées
Sur les armes des guerriers
Sur la couronne des rois
J'écris ton nom

Sur la jungle et le désert
Sur les nids sur les genêts
Sur l'écho de mon enfance
J'écris ton nom

Sur les merveilles des nuits
Sur le pain blanc des journées
Sur les saisons fiancées
J'écris ton nom

Sur tous mes chiffons d'azur
Sur l'étang soleil moisi
Sur le lac lune vivante
J'écris ton nom

Sur les champs sur l'horizon
Sur les ailes des oiseaux
Et sur le moulin des ombres
J'écris ton nom

Sur chaque bouffée d'aurore
Sur la mer sur les bateaux
Sur la montagne démente
J'écris ton nom

Sur la mousse des nuages
Sur les sueurs de l'orage
Sur la pluie épaisse et fade
J'écris ton nom

Sur la vitre des surprises
Sur les lèvres attentives
Bien au-dessus du silence
J'écris ton nom

Sur mes refuges détruits
Sur mes phares écroulés
Sur les murs de mon ennui
J'écris ton nom

Sur l'absence sans désirs
Sur la solitude nue
Sur les marches de la mort
J'écris ton nom

Sur la santé revenue
Sur le risque disparu
Sur l'espoir sans souvenir
J'écris ton nom

Et par le pouvoir d'un mot
Je recommence ma vie
Je suis né pour te connaître
Pour te nommer

Liberté.

- 1942 –
Paul Eluard

 

 

The word "freedom " may have been invented by man to try to explain what it is : a free, and to find ways of becoming.

The bird is free, flying from one point to another without asking any questions. The whole sky is his space . Do not we say also " free as a bird ? "

The lion is free , which moves as he wishes in the savanna , without fear of approaching human settlements . It seems that all of nature belongs to him .

And the man then ? Is it free ? Since he can not live nor even , sometimes , to visit all the space he wants , except of course, if this paper that other men were willing to grant. A man can not choose to live in a country other than where he was born, so the wild goose , which travels thousands of miles during the great migrations . The animal would it be more free than humans ? Or freedom evoked by the human being she is at another level ?

   Freedom does not conflict does not always limits imposed on it by respect for others , justice,  equity? If freedom requires us to get to where we see fit and through our neighbor 's living room without his permission , then we violate their private space , which is a sign of disrespect. But if we choose to exercise our freedom selfishly unconcerned by our citizens unjustly convicted and deprived of their own, we do not act justly. If beings as free of our choice, we favor some individuals over others , without one or the other are no guilty of anything , we are short of equity.

If he wants to continue to live in society , human beings have a duty to respect, justice and fairness. It is common to assert that man has the right to freedom ( relative, we have seen ). But when he acquired it , this freedom also orders of duties : respect others' freedom , justice , equity , and actions taken to enforce them .

The freedom that appropriates the space of the other by denying him any right to enjoy , but freedom is not colonialism. The freedom that is imposed on oneself , for oneself and for oneself alone , without concern for the freedom of others, that is pure individualism .

Freedom is the inalienable right of everyone, a right that knows no borders as the respect of others . Liberty denies others their own freedom, the freedom to think , to express his thoughts , to move , then vanishes itself , since it betrays its own purpose.  Can be free who denies the freedom of others and to do so creates its own limitations and its own links, those of man torn between his perception of the ideal of freedom and the application of its principles in the company hosting it.

Are there more beautiful than a poem by Paul Eluard, to describe the freedom of all time, has run both ink and blood ? I do not think so. I think everybody knows this wonderful poem, but I can not resist the desire to quote here , to read and reread :

 

 

 

 

On my school notebooks
On my desk and trees
On the sand on the snow
I write your name

On all pages read
Of all white pages
Stone sand paper or ash
I write your name

On the golden images
Arms warriors
On the crown of kings
I write your name

On the jungle and the desert
Of the nests on the broom
On the echo of my childhood
I write your name

On the wonders of the night
On white bread days
On the season brides
I write your name

On all my cloths blue
On the pond sun musty
On Moon Lake alive
I write your name

On the fields on the horizon
On the wings of birds
And on the mill of shadows
I write your name

Each breath of dawn
On the sea on boats
On the mountain dementia
I write your name

On the foam of clouds
On the sweat of the storm
On the heavy rain and tasteless
I write your name

On the glass of surprises
On the lips attentive
High above the silence
I write your name

On my shelters destroyed
On my headlights collapsed
On the walls of my boredom
I write your name

The absence desireless
On naked solitude
On the death marches
I write your name

Health back
The risk disappeared
On hope without memory
I write your name

And by the power of a word
I start my life
I am born to know you
To call you

Freedom .

- 1942 -
Eluard

 

 

 

 

 



22/08/2010
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